dimanche, février 03, 2008

Dernières Poubelles d'Alsace

De notre envoyé spécial à Strasbourg

En route pour la soirée LEDLP se mettent martel en tête.

Accueilli par 2 poivrots pathétiques qui tiennent encore assis grâce à la caisse, nous sommes fouillés par un vigile qui défend "le droit à fumer à l'intérieur" comme n'importe quel beauf, patron de bistrot, sous prétexte de démocratie, ceci avec l'aval du leader maximo de l'assemblée Molodoï, qui reconnait toutefois que l'engagement des "jeunes" laisse à désirer, "Ils n'ont pas de conscience politique, ils viennent faire la fète entre potes, ne comprennent pas ce qu'est la militance Molodoï".
Le droit à enfumer, nouveau combat des rebelles à papa...
Bière à 2 €, salle déserte, 25 teuffeurs dont 20 de l'orga, la tribu se réunit pour une soirée semi-privée!
Début de soirée monotone et prévisible, nous décidons illico vers 23 h 30, de repartir boire un chocolat chaud chez Jean-Hugues et de finir par une partie de CounterStrike...
Courage, fuyons !!!

lundi, avril 30, 2007

Sarkofeux et Hortezy ne manquent pas de Front

Sarkofeux et Hortezy ne manquent pas de Front

Il a fallu un peu plus de soixante ans pour briser le tabou. Mais ça y est. L'affaire est en route. Entre la droîte pétainiste, dont Le Pen est le représentant, et la droite gaulliste, dont Sarkozy est l'étrange héritier, c'était inconciliable. Le jumelage de Londres et de Vichy était interdit. Pour de Gaulle, qui a échappé à plusieurs attentats fomentés par l'extrême droite, pour Pompidou, pour Giscard, et même pour Chirac, qui n'a jamais caché la détestation qu'il en avait, l'alliance avec le Front national n'était pas envisageable. Bien sûr, tout cela n'est pas chimiquement pur. À l'échelon local, çà et là, il y a eu des bavures, des accords douteux, des trahisons... Mais ils ont toujours fait plus ou moins scandale et ont toujours été vigoureusement dénoncés par tous les partis. Les Blanc, les Soisson, sont sortis en loques de leur flirt avec le FN...

Mais voilà. Le Pen est vieux, et la génération qui arrive avec Marine est celle de Sarkozy et de ses copains. Il est temps d'apprendre à se connaître et à s'apprécier, car l'avenir de la droite est à eux. Comme en Italie. C'est d'ailleurs l'essence du berlusconisme: la particularité de Forza Itàlia, c'est qu'elle a intégré l'extrême droite italienne de Gianfranco Fini, Alleanza nazionale. Et Sarkozy est un fervent admirateur de Berlusconi.
Ce qui est déprimant avec Sarkozy, c'est sa rouerie aux grosses ficelles, qui démontre qu'au fond il nous méprise. Ses argumentations à deux balles trahissent le peu de cas qu'il fait de l'intelligence de ses électeurs. Quand il dit que ce n'est pas lui qui a proposé, à une semaine du premier tour, de permettre au Front national d'entrer au Parlement, mais Brice Hortefeux, il se fout de notre gueule. Jusqu'à nouvel ordre, Brice Hortefeux, c'est Nicolas Sarkozy, et réciproquement. Il est inimaginable que Brice ait proposé de changer le mode de scrutin afin de favoriser le FN à huit jours du premier tour sans en avoir longuement débattu avec Nicolas. Nicolas a même dû le prévenir: « OK, tu le dis, et après, je te désavoue pour ne pas perdre mon électorat centriste. » « Pas de problème, on fait comme d'habitude », a dû répondre Brice. Les protestations de Sarkozy sont bidon. Ce qui est réel, c'est le virage à droite historique de la droite. C'est dit. Le message est passé. Les électeurs du FN et Marine Le Pen ont parfaitement compris. Cette droite, qui vit dans l'opprobre depuis la Libération, va enfin pouvoir redresser la tête. Ses racines, qui s'enfoncent dans la collaboration, vont enfin retrouver un terreau tonifiant. Le sarkozysme va lui redonner ses lettres de noblesse, comme le berlusconisme a réhabilité les descendants des fascistes, comme la droite espagnole est en train de réhabiliter le franquisme. Comme la droite autrichienne a pactisé avec Haider. Comme la droite polonaise est en train d'effacer la différence avec l'extrême droite traditionnelle et antisémite, etc. Le phénomène est européen.
La question se pose. Est-ce que la France va, en disant « non» à Sarkozy, donner un coup de frein à la régression nationaliste que son propre « non » au traité constitutionnel a accélérée, ou bien va-t-elle aller au bout de sa dégringolade et tenter l' aventure d'une droite « décomplexée », comme on dit maintenant. Décomplexée... Ça veut dire fière de son héritage, de tout son héritage. De De Gaulle, oui, bien sûr, mais davantage pour le SAC et l'immobilier que pour la Résistance, et surtout de Pétain, pourquoi pas, n'est-il pas le vainqueur de Verdun? Les enjeux de toutes ces vieilles histoires semblent tellement lointains, aujourd'hui. On fera bientôt comme si la politique avait les mêmes implications que la littérature. En 1838, il n'était pas possible d'aimer à la fois Stendhal et Chateaubriand. Aujourd'hui les amoureux de la littérature du XIX" siècle aiment les deux. Mais les responsabilités de la politique sont différentes de celles de la littérature. Les démocraties modernes de l'après- guerre ont répertorié un certain nombre de crimes imprescriptibles, et ce sont tous des crimes politiques. Les descendants de l'école stendhalienne et ceux de Chateaubriand peuvent encore aujourd'hui s'affronter sans que la vie de personne soit en danger. Que les héritiers du néo-pétainisme et ceux du néo-gaullisme en soient à effacer un différend que l'on croyait irréparable représente, au contraire, un véritable danger pour beaucoup de gens. Car dans l'affaire, ce n'est pas le pétainisme qui est avalé par le gaullisme -lequel est une curiosité de l'histoire de la droite. C'est bien le gaullisme qui est avalé par un pétainisme relooké par la génération Marine Le Pen. La question de la proportionnelle - défendue par les autres candidats - est anecdotique, finalement. Ce qui compte, c'est le sens qu'elle revêt quand elle est posée par Sarkozy à ce moment précis, et qu'elle sonne comme l'enterrement programmé de la hache de guerre entre la droite de gouvernement et l'extrême droite. On se demandait en quoi Sarkozy, candidat de droite un peu agité, mais assez classique, en fin de compte, était un candidat de rupture. Maintenant on le sait. Il s'agit de la rupture avec la discipline républicaine qui consiste à ne pas s'allier avec le Front national. Oh, bien sûr, pas tout de suite, mais c'est parti. En 2012, ce sera fait, selon les mots de Hortefeux lui-même, qui propose la réforme du scrutin pour cette date. Entre- temps, on s'apprivoisera, on échangera des idées, ce sera le temps des fiançailles, quoi... 'Sarkozy se croit l'initiateur du phénomène. Il n'en est que l'instrument. Son ampleur continentale le démontre. Il est le marqueur d'une crise de la démocratie qui fait tousser de Brest à Vladivostok. Dans la pente, il fait partie de ceux qui nous exhortent à descendre, ce qui est toujours plus populaire que d'encourager à monter. Descendre vers les passions identitaires. Descendre vers la justification génétique et divine de l'injustice, de la pauvreté, de la fragilité. Descendre vers le « bon-sens-entre-soi » qui ricane devant les complications intellectuelles d'un « vivre ensemble » d'aujourd'hui. Descendre vers l'obéissance aux peurs. Descendre vers un monde où les exigences boursières des rentiers tiennent lieu de politique industrielle, écologique, culturelle, sociale... Dans ce contexte, la tribune de Michel Rocard dans Le Monde du 13 avril est une réponse à la menace de cette droite qui, mathématiquement, va gagner les élections si toutes les tendances sociales et démocrates ne font pas alliance. On a fait l'union sacrée contre Le Pen en votant Chirac. Cinq ans plus tard, le rusé Sarkozy, l'homme qui va réussir à nous faire regretter Chirac, prend les devants, et signale les prémices d'un accord futur avec l'ex- trême droite dès avant le premier tour. Politiquement, la proposition de Rocard a le mérite d'être franche et profondément démocratique: « Dans quelques jours, les Français décideront qui, de François Bayrou ou de Ségolène Royal, sera le mieux à même de battre Nicolas Sarkozy. Et ils le feront d'autant mieux qu'ils sauront que, dans tous les cas, une alliance sincère et constructive difendra au second tour puis aux législatives un projet commun d'espoir pour la France. » Même si« le projet commun d'espoir pour la France » n'est pas une formule très bandante, ça a quand même plus d'allure qu'un Sarkozy qui cite Blum et Jaurès à la tribune en même temps que, par-dessous la table, il fait du pied à Marine Le Pen en lui promettant un vrai bon boulot pour 2012. C'est-à-dire demain. Car si Sarkozy est élu, pas d'illusion, on en a pour dix ans. Il mettra la main sur tout, et sera réélu. On ne vote pas pour soi, on vote pour les autres. Dans une démocratie, on vote pour les plus fragiles. Un copain, qui faisait allusion au fait qu'on était naturellement de droite et culturellement de gauche, me disait en rigolant: « Les petits mecs de droite comme moi qui ne gagnent pas trop bien leur vie, ils ont intérêt à voter à gauche... » Pour les chercheurs chroniques de logement, les travailleurs précaires, les mal installés, les non-héritiers, les locataires en retard, les bancals, les vieux sans fortune, les enfants engendrés dans un mobilier tout à crédit, pour ceux qui ne mangeront jamais sept fruits et légumes différents par jour parce que t'as vu les prix, pour les pas pareils, pour les pas conformes, pour les un peu trop ceci ou pas tout à fait assez cela, les sondages qui donnent Sarkozy gagnant, c'est la météo qui leur annonce un hiver de plusieurs années..

Mercredi 18 avril 2007 édito de P.VAL CHARLIE HEBDO